Patrick Tondeux, dessinateur croqueur de procès
Il est l’une des rares personnes à pouvoir capturer ce qu’il se passe lors des procès. Nous vous emmenons ce soir à la rencontre de Patrick Tondeux. Dessinateur, il réalise des croquis d’audiences pour La Tribune de Genève. Des dessins qui, une fois publiés, sont souvent conservés comme de précieux souvenirs. Portrait.
Vous le connaissez à travers ses aquarelles publiées dans la Tribune de Genève. Patrick Tondeux est dessinateur pour la presse. Le contenu des procès, Tondeux ne s’en mêle pas, trop pris dans sa bulle de dessinateur. Pourtant il assiste régulièrement à des audiences sur des affaires parfois sordides. À chaque fois, il retranscrit avec précision l’atmosphère avec un soin tout particulier porté à la posture de ses modèles. «Un personnage dit énormément de part son attitude. La façon de se tenir, la façon dont il se tient les mains, comment il pose ses pieds et ça j'adore le dire. (...) C'est ce qu'ils ont vécu qui fait leur expression. Un portrait dévoile une vie, une histoire, une situation», expose-t-il.
Lors des audiences, Patrick Tondeux est présent dans le box des journalistes, avec la meilleure vue possible sur son sujet. Là son crayon danse sur le papier, saisi les contours des silhouettes et recrée la scène qui se joue devant lui. «Le résultat devrait être comme une image qu'on a en mémoire,je trouve que c'est l'instrument pictural qui se rapproche le plus de cette trace», estime le dessinateur.
L'art comme compagnie
Il le dit sans détour, c’est son art qui lui donne depuis longtemps la sensation d’exister. Originaire du sud de la France, Patrick Tondeux arrivera plus tard à Genève avec son père et sa mère. D’aussi loin qu’il se souvienne, le dessin a toujours fait partie de sa vie. «C'était aussi une compagnie. Une compagnie qui, lorsqu'elle apparaissait en public, elle me valorisait! Je me souviens que vers 14 ans, mes caricatures de profs, un de mes amis d'enfance les vendaient cinquante centimes» raconte-t-il.
Depuis, son business a bien évolué. Après un apprentissage de graphiste, Patrick Tondeux travaille dans plusieurs sociétés dont une agence de publicité -où il raconte la vie de l’entreprise sous forme de petite BD. Il a 25 ans lorsqu’il prend son envol en tant qu’indépendant et se consacre au dessin. C’est lorsque son chemin croise celui d’une journaliste de La Tribune de Genève qu’il tombe dans la grande marmite des procès genevois, il y a près de 20 ans: «Elle me dit qu'elle rentre d'un procès et moi je lui dit que j'ai toujours voulu dessiner des procès! Elle en a parlé à la rédaction et ça a commencé comme ça», explique-t-il simplement.
Depuis, c’est au Palais de justice que l’on croise le plus souvent le dessinateur. Connu comme le loup blanc au sein du bâtiment, ses productions font leur effet une fois imprimées: «Des avocats m'ont dit que des prévenus, découvrant leur portrait dans La Tribune de Genève, en éprouvaient une grande joie, une satisfaction», nous confie-t-il. Les juges, procureurs et avocats eux-même sont par ailleurs friands de découvrir le travail de Tondeux. Voilà de nombreuses années que ses dessins sont attendus, parfois redoutés, mais toujours admirés et souvent conservés.
Un observateur privilégié
Me Vincent Spira apprécie le sens du détail. S’il est reconnaissable grâce à ses lunettes rouges, il l’est aussi par ce réflexe de poser sa montre sur le pupitre lorsqu’il plaide. Un geste qui n’a pas échappé au dessinateur. Pour Me Spira, pouvoir croquer l’essence d’un procès fait de Patrick Tondeux un observateur privilégié: «Je pense que c'est quelque chose de très important car cela relate une ambiance d'audience, c'est essentiel. Il le fait parfois avec un certain humour, mais aussi avec gravité.»
À 76 ans, Tondeux continue de raconter les audiences en aquarelles mais pas que. Il amuse aussi, chaque année, avec ses cartes de vœux caricaturées. En 2025, Me Spira en avait fait les frais, on le voit avec Me Robert Assael, finissant une plaidoirie alors que toute la salle est assoupie. «Cela rappelle le souvenir, dont on me parle encore aujourd'hui, du jour où j'ai plaidé devant une juge assesseure du Tribunal criminel qui s'est endormie...! Moi ça me fait énormément rire, c'est une autodérision que j'adore et Patrick a le talent nécessaire pour croquer ce qu'il faut, non pas de l'aspect physique des gens, mais de leur personnalité», commente l'avocat pénaliste.
Avant elle, il y en a eu d’autres. Nombreux sont les magistrats et magistrates, avocats et avocates qui ont été grimés par ses traits. Alors, que nous réserve-t-il dans les semaines à venir? «Il faut qu'il y ait un évènement: un procès qui a retenu l'attention, un évènement à venir dans le milieu de la justice... Voilà, je travaille cet évènement», nous explique Tondeux de façon mystérieuse.
Un évènement marquant sur la carte de voeux 2026? Vous l’avez? Nous oui, mais interdiction de le dévoiler.